Budget PacEn euros courants ou constants Budget PacEn euros courants ou constants ?

Le 2 mai, la Commission européenne devrait présenter un projet de budget pour la période 2021-2027 préparé dans la douleur. Outre l’incertitude du Brexit, qui retire un contributeur net important, le Royaume-Uni, Bruxelles doit compter avec l’instabilité politique et des États membres peu enclins à dévoiler leurs cartes.

Habituellement, l’exécutif européen sonde les capitales pour caler les grandes orientations budgétaires avec les grands États membres. Cette fois, il est confronté à l’absence de gouvernement en Italie, à un gouvernement allemand qui s’installe à peine, et se plaint également de l’absence de volonté française de donner un cap clair.

Dans ces conditions, quel sera le traitement pour la Politique agricole commune, qui représente environ 40 % du budget de l’UE ? Maniant la rumeur pour déminer le terrain, la Commission a d’ores et déjà lancé quelques signaux visant à contredire tout message laissant penser que la Pac pourrait faire les frais du Brexit.

Toutefois, il faudra être extrêmement vigilant à la lecture des chiffres qui sortiront, Bruxelles proposant systématiquement de nombreux tableaux, mélangeant à bon escient euros courants et euros constants selon les messages politiques souhaités. Pour minimiser une baisse, rien de tel que de s’exprimer en euros courants.

Ainsi, une baisse de 6 % du budget de la Pac en euros constants serait plus ou moins une application du retrait de la contribution britannique au budget Pac au cours de la période – un peu moins de 3 milliards d’euros par an, les contributions des États membres faisant l’objet d’un accord en euros constants. En revanche, en euros courants, cette même baisse équivaudrait en réalité à une coupe sombre d’environ 20 % de la valeur des aides payées aux agriculteurs.

Ainsi, en 2012, avec une défense du budget de la Pac « à l’euro près », le président français Nicolas Sarkozy avait, en fait, obtenu un maintien du budget en euros courants. En réalité, chacun a bien vu que la valeur des aides reçues a baissé sur la période 2013-2020 du niveau de l’inflation, soit environ 13 %. La part relative de la Pac dans le budget communautaire a reculé.

De même, Jacques Chirac obtint en 2000 « la sanctuarisation » du budget de la Pac – certes en euros constants à l’époque. Mais le nombre de bénéficiaires de ce même budget avait été multiplié par deux du fait des élargissements aux nouveaux États membres, passant de quelque 6 millions d’agriculteurs à 12 millions.

Toute la question sera donc de savoir si le président français, dans sa défense du budget Pac, obtient une baisse limitée en euros constants, et non pas en euros courants. Car même limitée, une baisse en euros courants remettrait en cause le périmètre budgétaire de la Pac et conduirait à une baisse historique.